La Seine des Belvédères

Limites et voisinages

Depuis le boulevard Périphérique jusqu’au pont de Clichy, la sous-unité associe la Seine et ses abords immédiats au coteau qui la borde le long de la boucle. Elle est limitée par la ligne de crête du coteau, et interrompue au droit de la Défense dont les volumes bâtis tendent à effacer le relief de coteau.

Motifs et compositions du paysage


Une structure majeure et identitaire

La position de la Seine et du coteau constitue une structure paysagère reconnaissable qui procure un horizon à l’échelle de la métropole.

« C’est un vrai département de paysages, avec de forts contrastes. Au cœur de la métropole c’est sans doute celui qui a le plus de paysages qu’il est possible de raconter.
C’est un des rares endroits où se trouvent des belvédères sur la métropole, (…) et à partir desquels on voit Paris dans son ensemble dans une relation visuelle réciproque extrêmement forte. »
[Extraits d’entretien, Dominique Alba, directrice générale et Christiane Blancot, directrice d’études, APUR]

Les relations de hauteur des reliefs et du bâti, la position des belvédères, l’identification des horizons arborés sur le coteau, définissent des références paysagères.

Une concentration remarquable des horizons de nature

« C’est un territoire qui a énormément de reliefs. Pour nous c’est un atout car qui dit relief dit variété du paysage. Cela donne des points de vue qui sont très recherchés par notre clientèle. D’où toute la complexité de notre intervention sur des paysages de coteaux : pouvoir offrir, par nos réalisations, des points de vue, sans pour autant être visible pour ne pas générer de nuisance. (…) Je pense que toutes les zones de relief sont les zones où nous avons le plus de recours de la part d’habitants et éventuellement d’associations. Le relief crée le recours. Car évidemment lorsqu’on est sur un coteau, les opérations se voient, et il existe une appréhension sur la « prise de vue » que pourrait avoir un immeuble un peu élevé dans un paysage. »
[Extrait d’entretien, Olivier Waintraub, Nexity]

Cette sous-unité présente une des configurations paysagères les plus intenses de la métropole, fondée sur un socle naturel particulièrement éloquent. La Seine se développe sur plus de 15 km, doublée par le coteau en forme d’amphithéâtre que le fleuve a creusé dans le plateau, pour un dénivelé d’environ 100 m.
La position particulièrement plaisante des rebords, associant de superbes vues à une grande variété de situations et de formes du relief, a motivé de nombreuses implantations de châteaux et de domaines, puis de jardins publics et de villas. Ainsi les arbres et les boisements s’ajoutent aux reliefs et à la Seine pour magnifier la dimension paysagère du lieu. A proximité immédiate de la ville très dense, le contraste est renforcé, et le coteau constitue un horizon de référence à l’échelle de la métropole.
La présence de l’eau contribue également à la qualité paysagère. Elle contribue à l’évocation de la nature malgré le caractère construit des bords du fleuve profondément restructurés avec le temps, du contour des îles recomposé, des berges solidifiées, maçonnées.

D’exceptionnelles conditions de perception

Les belvédères du coteau

La forme du relief a suscité des aménagements de belvédères particulièrement nombreux, situés principalement dans les jardins. La forme d’amphithéâtre fait que le site est à la fois le point de vue et un des éléments des panoramas, formant les limites du paysage perçu.

Au-delà des premiers plans constitués par le front urbain de Boulogne-Billancourt et le bois, les belvédères offrent de larges vues sur Paris, jusqu’aux horizons naturels situés au nord et à l’est (buttes d’Orgemont et de Montmartre, plateau de Romainville…).

Les belvédères aménagés en tant que tels se trouvent principalement dans les jardins, ou d’anciens jardins – Rodin, Bellevue, Brimborion, Saint-Cloud, Bécon… Ils sont moins identifiables dans l’espace public, à l’exception notable de la terrasse du Fécheray à Suresnes. Des vues s’ouvrent toutefois dans l’axe de certaines rues perpendiculaires, ou au hasard d’une brèche entre deux immeubles. Enfin, la ligne de train Saint-Lazare-Versailles, située sur le haut du coteau, offre un point de vue exceptionnel et linéaire, permettant de très belles vues cinétiques entre la Défense et Saint-Cloud, une perception qui contribue à forger une perception territoriale pour les nombreux usagers de la ligne.

« Au XVIIe siècle on a extraordinairement bien tiré parti de ces coteaux avec le plus bel architecte-paysagiste de cette époque, Le Nôtre : le parc de Saint-Cloud où il a tiré parti des points de vue, la grande perspective de Meudon où il a tiré parti de ce point de vue, l’extraordinaire paysage du bassin octogonal du grand canal du parc de Sceaux. Il avait réussi à bien aménager tout en tirant parti des beautés de l’existant. »
[Extrait d’entretien, Lionel Favier, Neuilly Puteaux Seine Ecologie]
« On se situe en altitude par rapport à Paris. (…) Depuis les coteaux, on retrouve de grandes unités comme le Sacré-Cœur, le mont Valérien, la Défense, la tour Eiffel … C’est un vrai promontoire sur tout l’Ouest parisien. »
[Extrait d’entretien, Nicolas Deverre, Grand Paris Seine Ouest]

Les perspectives de la Seine}

« Le plus grand atout de la Seine, c’est finalement cette largeur qui ne sera jamais construite et qui de toute façon se ressent. »
[Extrait d’entretien, Sophie Schmitt, SODEARIF]
« On parle toujours beaucoup de la Seine, (…) J’aurais tendance à dire qu’il y a une espèce d’attirance, [le fleuve à tendance] à attirer tous les regards (…) »
[Extrait d’entretien, Corinne Legenne, IAU IdF]

La Seine ajoute d’autres vues à celles des belvédères. En tant que dégagement visuel, le plan d’eau ouvre de magistrales perspectives, donnant sur des horizons très variés du fait de la forme de boucle. La forme de boucle intensifie la vastitude du fleuve, et le voisinage des coteaux boisés compose un paysage qui se démarque des façades urbaines de Paris. Ce sont les ponts qui offrent les principales vues, bénéficiant de l’ouverture du fleuve et ouvrant également des perspectives dans l’autre sens, vers les coteaux et vers les tissus urbains voisins. Traverser la Seine devient ainsi une expérience paysagère d’une grande intensité, par les vues, la sensation d’être dans l’espace-même du fleuve, ainsi que l’effet de franchir un seuil du territoire.

Les paysages difficiles des berges de la Seine

Comparativement aux ponts, les berges de Seine constituent une expérience moins intense de l’espace du fleuve, occupées par les routes départementales 1 et 7, à quelques rares exceptions près (jardin de l’île Monsieur, notamment). Le trafic, le statut de voie à grande circulation, l’absence de trottoir du côté du fleuve interdisent le plus souvent l’accès des berges aux piétons, même si certains aménagements tendent, par endroits, à remédier à cette situation.

Pour les automobilistes eux-mêmes, la vue sur la Seine est le plus souvent obérée par un écran opaque de clôtures et de végétation accompagnant les très nombreuses péniches-logements amarrées le long du cours d’eau. Les péniches elles-mêmes, parfois amarrées perpendiculairement à l’écoulement, ajoutent un obstacle entre la berge et le plan d’eau, et confisquent la vue sur le fleuve.
Le statut routier se trouve encore renforcé aux échangeurs des portes de Saint-Cloud et de Sèvres qui occupent d’importantes surfaces et imposent les nuisances du trafic : ces vastes ouvrages constituent des obstacles physiques à la fréquentation des berges, et ont été conçus sans considérer le paysage.

Il résulte de cette situation, que la Seine n’est que peu présente à l’espace public, en dépit du linéaire important développé.

« La Seine on ne la voit quasiment jamais, tout le monde fait ce constat là. »
« [Le rapport avec la Seine] est une question que nous nous posons, et qui soulève de nombreuses difficultés : sur les secteurs de la RD1, de grandes voies de circulation (…) nous sommes confrontés au bruit notamment. Dans plusieurs projets que nous développons en front de seine, nous nous rendons compte avec les urbanistes et les paysagistes que ce qui est important c’est de constituer des transversales, mais aussi de travailler dans l’épaisseur des tissus urbains de la Seine, de proposer des tracés parallèles : on ne peut résoudre le rapport à la Seine qu’en ne travaillant que sur le front de scène : ce n’est pas un décor de "fond de scène" ! »
[Extraits d’entretien, Véronique tirant, SEM92]
« Un élément majeur qui n’est pas encore valorisé aujourd’hui c’est la Seine. C’est un atout d’être en bord de Seine pour une ville, sauf qu’aujourd’hui s’interpose une départementale, un axe routier qui est très fréquenté. »
[Extrait d’entretien, Nathalie Dimopoulos, Saint-Cloud]

Le coteau et les façades sur Seine, un paysage urbain très en vue, et fait de « collages »

Après l’aménagement des domaines aristocratiques à proximité des villages de coteau, l’intérêt paysager du site n’a pas cessé de motiver les implantations, notamment résidentielles. Ainsi, le coteau accueille aujourd’hui, autour des quelques bourgs initiaux (Saint-Cloud, Suresnes, Puteaux), une combinaison de secteurs pavillonnaires et de bâtiments collectifs cherchant les vues. Cette urbanisation s’insère dans les nombreux parcs et jardins qui jalonnent le relief et lui confèrent, par leurs masses de verdure, une ambiance particulière.

Entre le pied du coteau et la Seine, d’anciens secteurs industriels ont laissé place à des immeubles de bureaux et résidentiels, transformant le paysage au voisinage des berges.

Les îles : des territoires singuliers

Quatre îles importantes occupent le lit de la Seine dans cette sous-unité : les îles Saint-Germain, Seguin, de Puteaux (et l’île du Pont qui la prolonge) et de la Grande Jatte.
Le caractère insulaire - bien qu’elles soient toutes traversées par des ponts - leur donne un statut de territoire singulier, renforcé par le fait que les berges n’y sont pas occupées par les voies routières. Elles y sont en général plus accessibles, cependant l’amarrage des péniches n’est pas moins dense. Les îles accueillent d’importantes surfaces d’équipements publics ouverts tels que des terrains de sport et des jardins (la moitié de l’île Saint-Germain, la totalité de l’île de Puteaux).
L’île Seguin, ancienne « île-usine » qui a laissé l’image d’un paysage très « iconique », est l’objet d’un des projets urbains les plus notables au moment de l’élaboration de l’atlas -2013-.

« Avant il y avait l’usine Renault mais le coteau restait très fort. [L’usine] était un volume : c’était le paquebot, d’un seul tenant, sans décrochements. Dans le projet actuel de Jean Nouvel le bâtiment devient aussi fort que le coteau lui même. »
« En termes de paysage il y a un réel enjeu sur l’Ile Seguin. Avec des débats selon que l’on se situe d’un côté ou de l’autre de la Seine et selon la perspective que l’on a : soit sur les coteaux, soit sur la ville. »
« L’Ile Seguin, c’est un élément qui va être complètement central par rapport à toute la logique du territoire de la communauté d’agglomération. On ne sait pas exactement ce qui s’y fera mais ça aura un rôle stratégique et paysager évident. »
[Extraits d’entretien, Nicolas Deverre et Karine Turro, Grand Paris Seine Ouest]

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