Introduction (CAUE 92) : 1993 - 2013 ou "Vingt ans après"

publié le 21 juin 2013 (modifié le 6 juillet 2015)

La loi paysage date de 1993 et nous sommes en 2013. Ce qui lui donne 20 ans et nous permet un clin d’œil en direction du titre du roman d’Alexandre Dumas.


Mais il ne s’agit pas simplement d’un jeu de mots. Il est temps en effet de se demander où nous en sommes aujourd’hui. En un mot, 1993 était le temps de la découverte, de l’expérimentation et 2013 serait-il déjà le temps de la routine ?

Depuis 1993 :

  • Qu’est-ce qui a changé ?
  • Avons-nous changé ?
  • Depuis que cette loi est sortie (certains, des juristes notamment, disaient qu’elle était « inapplicable » et qu’il n’en sortirait donc rien), notre vision du paysage est-elle la même ?

Au CAUE, nous avons fait plusieurs expériences

  • nous avons bien sûr organisé des journées d’information pour expliciter comment appliquer la loi
  • nous avons organisé des formations pour les enseignants, qui découvraient avec stupeur l’existence du « paysage urbain », à partir de trajets en train
  • nous avons expérimenté avec la ville de Meudon et Issy-les-Moulineaux, deux « POS paysagers », à partir de « séquences » de découverte de la ville
  • nous avons demandé à un couple de jeunes paysagistes pleins de promesses, Michel Desvigne et Christine Dalnoky, de concevoir avec nous un numéro de notre revue TOPOS, qui finalement s’appellera « Parcours dans les paysages des Hauts-de-Seine », qui, comme les séquences citées plus haut, montraient déjà qu’intuitivement on commençait à se poser la question de la dynamique des paysages, de leur perception active, contre une représentation fixe, statique, celle de la perspective géométrique
  • nous avons monté avec l’aide du Ministère de l’Environnement un « observatoire photographique des paysages », à partir de quarante sites, que nous ne sélectionnerions sans doute plus de la même façon aujourd’hui.

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S’il n’y avait qu’une remarque à faire aujourd’hui, ce serait :
évitons une confusion grandissante entre territoire, environnement et paysage.

Le territoire est un espace dont la caractéristique première est d’être borné, dont la caractéristique seconde est d’être l’objet d’un droit de propriété.
L’environnement est un avatar de la théorie du « milieu », qui étudie les rapports de ce milieu avec l’habitat des espèces vivantes.

Le paysage : cela a d’abord été un genre pictural, qui est né sous la Renaissance et c’est aujourd’hui, en tant qu’empiricité, d’abord quelque chose que l’on regarde et que l’œil saisit comme un tout
Cela a à voir avec le narcissisme pour parler comme Freud, ou le registre de l’Imaginaire, pour parler comme Lacan, autrement dit avec le monde des images et des miroirs, monde qui n’est pas celui du langage, monde qui est un des modes où se donne la réalité humaine.

Depuis la Renaissance, bien entendu, le rapport aux images a changé et nous en sommes aujourd’hui à « street view » et Google earth, qui nous offrent le monde à domicile… depuis un écran.

Par ailleurs, un objet nouveau est apparu : la métropole, ce qui, au-delà du « Grand Paris », de « Paris Métropole » ou de « Métropole de Paris », est à appréhender comme quelque chose qui fait assez peur, car justement, c’est une image de l’immensité, de l’infini de l’étalement urbain, de ce que l’on ne maîtrise plus.
C’est quelque chose qui précisément, pour beaucoup de gens, ne se saisit pas d’un coup d’œil et qui est encore sans repères.

Entre une représentation qui tend à nous donner en quelques clics n’importe quel point du monde, mais de façon irréelle et une « réalité » au futur incertain, nous avons encore de belles années pour fabriquer de nouveaux atlas.

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On a prévu d’organiser quatre ateliers ; je ne vais pas dévoiler leur thématique, je voudrais uniquement insister sur trois choses :

  • ne soyez pas timides, n’hésitez pas à vous exprimer
  • mais ne soyez pas non plus trop « intelligents », le propos ce matin n’est pas de briller ou de se justifier, mais de faire part de vos ressentis
  • faites-vivre ce matin les paysages des Hauts-de-Seine : mettez en partage les images qui vous traversent l’esprit.