Groupe de travail 2 : Reconnaître le territoire par les repères

Principaux sujets évoqués et compte rendu du rapporteur

Table animée par Paul Baroin (architecte-urbaniste, APUR), Christian Marion (Conseil général 92) et Marie Lubat (équipe MOE)

NOM QUALITE
Jacques CAPET Vice président association « Naturellement Nanterre », Environnement 92
Aldrig VALLEE Ingénieur projet, direction de l’environnement, Nanterre
Elisabeth BENON Service urbanisme, Colombes
Catherine BRUNET Paysagiste conseil de l’Etat
Adélaïde BARDON Paysagiste, IAU IdF
Christian MARION Chef du service urbanisme, Conseil général 92
Thierry HUBERT Prévention des risques, ministère de l’Ecologie

Après une rapide introduction, Paul Baroin propose d’organiser les débats autour de différentes questions :

  • Pourquoi a-t-on besoin de repères ? Les subit-on ?
  • Quelles formes prennent-ils ?
  • Qu’est-ce qu’indique le repère ?
  • Dans quelles situations urbaines les perçoit-on ?
  • Quels sont les outils permettant d’avoir une conscience de la fabrication de repère ? Avec pour objectif que le paysage soit présent à toutes les étapes de la conception des projets.

Les échanges en table ronde

Qu’est ce qu’un repère et quelle(s) forme(s) prend-il ?

Les réflexions autour de ce qu’est un « repère » ont mené à une définition multiple de ce terme et de ce qu’il revêt. En effet, celui-ci peut prendre de nombreuses formes : artificielle ou naturelle, ponctuelle pour plus large…

Liste non exhaustive des repères cités pendant la table ronde : la Défense, l’arche, le CNIT, les reliefs, les vues lointaines, la Seine, les ponts, l’axe historique, l’A 86, les terrasses de Nanterre, le mont Valérien, la couleur de façade (ex. le jaune du bâtiment du CAUE 92), certaines formes urbaines (pavillonnaire, grands ensembles, cités jardins), le port de Gennevilliers, la préfecture, le tramway, la tour Bouygues, le parc de Saint-Cloud, le parc de Sceaux, les grands massifs forestiers, le musée de la céramique (Sèvres), l’hôpital Beaujon (Clichy), la fumée du centre d’incinération de Saint-Ouen, les stations de métro, le bâti industriel, les équipements de type stades…

La dimension personnelle de l’identification de repères
Un préalable important est mis en avant dès le début des discussions : le repère revêt un caractère personnel au sens où un repère pour une personne peut ne pas en être un pour une autre. Exemple : une station essence, une épicerie, un café, un bâtiment bleu, etc.
Cette individualité de la perception de repère est due au vécu et même parfois à l’affectif. Chacun à son repère, en dehors des repères communs, plus partagés.

Dans les années 1970-80 le repérage s’interrogeait davantage par l’architecte. Aujourd’hui sont pris en compte la vision du paysagiste et la perception par les usages.

La nécessité du contraste, du rapport d’échelle, et le risque de « sur-repérage »
Un élément n’est un repère que lorsqu’il constitue un contraste dans un environnement.
Exemple : le mont Valérien au sein de la plaine de la boucle nord du département
Exemple : les jeux de couleur de façade jaune au sein d’un ensemble dominé par d’autres couleurs.

Si un repère peut parfois prendre une forme bâtie, c’est aussi parfois le « vide » laissé qui devient repère. C’est notamment le cas sur l’opération des terrasses à Nanterre.

La recherche de fabrication de repères peut mener à leur « effacement » et à de la confusion. La présence de trop nombreux éléments repères, en font perdre la force et le rôle.

Le socle géographique
La topographie constitue un socle de repère, notamment grâce aux reliefs, aux vues lointaines (depuis les grandes buttes, les coteaux, les rues en pente, les bords de Seine…). Il est jugé important de les mettre en avant et de les respecter. La topographie est à la fois ce qui est vu et ce qui permet de voir.
De plus, la Seine constitue un élément important de repérage, en particulier en fonction de notre situation par rapport à elle (avant ou après), les ponts. Cependant le fleuve peut également constituer un repère perturbant car il est possible de le traverser différentes fois en raison de ses méandres.

L’axe / les grandes infrastructures
Un axe peut constituer un repère, un élément grâce auquel on s’oriente. C’est par exemple le cas de l’axe historique au nord du département.

Le repère peut être auditif ou sensoriel : exemple des autoroutes, des voies ferrées.

Il peut également être un obstacle. Exemple de l’A 86.

Les monuments repères
Parmi les monuments repères du département, la Défense a souvent été citée. Elle se voit de loin d’où elle constitue un bouquet compact de tours mais grâce auquel il est possible de se repérer en localisant certaines tours « repères » parmi cet ensemble. Depuis les Hauts-de-Seine, on constate son étendue, orientée par l’axe. Elle revêt en outre un caractère insulaire en lien avec sa forme urbaine et architecturale et à son système hors sol.
Depuis l’intérieur du quartier d’affaire, certaines constructions constituent elles-mêmes des repères : l’arche et le CNIT, en raison du contraste de leur forme bâtie avec le reste des constructions du quartier.
Outre sa forme bâtie et sa situation (axe historique), la Défense renvoie à la dimension symbolique du repère. Ce qu’elle représente peut être ainsi valorisée ou au contraire dépréciée selon les personnes et leur rapport au monde des affaires.

Les formes urbaines ?
Au-delà des monuments repères, les formes urbaines peuvent également constituer des repères.
A ce titre sont cités les exemples des grands ensembles qui caractérisent notamment le nord des Hauts-de-Seine ou du pavillonnaire ancien correspondant à des traces anciennes et historiques que l’on retrouve notamment à Colombes, Courbevoie ou sur les coteaux du département. Cependant pour d’autres, les formes urbaines peuvent au contraire participer d’une « banalisation » : l’exemple du pavillonnaire peut en effet davantage relever d’un paysage de banlieue, qui n’évoque pas l’idée de repère.
Cette différence d’appréhension pose la question du besoin que le repère soit ou non unique. Il renvoie en outre à la question du contraste, de la distinction au sein d’un paysage.

La centralité
Dans un territoire de banlieue le centre ville permet de se repérer.

Pourquoi a-t-on besoin de repère ?
Le repère, quelque soit sa forme permet de s’orienter, de ne pas être perdu, d’être guidé, de comprendre où on se trouve, et ainsi d’ « être chez soi », dans un lieu que l’on peut s’approprier. Le repère rend un service, celui de donner des marqueurs permettant de s’orienter. Le repère interroge également la question d’identité et d’auto-évaluation par rapport à l’environnement que l’on s’approprie. Le repérage est une appropriation.

Pour en être un, l’élément repère a parfois besoin d’être combiné à d’autres afin de s’orienter et de se situer. « C’est la combinaison des repères qui fait le repérage ».
Exemple : La Défense/la tour Eiffel/la tour Pleyel

Dans cette même logique, le repère peut s’appréhender sous la forme de séquence : le déplacement et l’apparition successive de repères permettent de se situer, à l’inverse par exemple du point de vue figé (de type photographie).

Comment créer/permettre le repère ? Faut-il en fabriquer de nouveaux ?
Un préalable indispensable et partagé par les participants à la table ronde est celui du diagnostic : la nécessité d’identifier les repères existants, afin que les projets soient dessinés en en ayant cette connaissance.

Dans cette optique, un travail d’identification des vues vers ces repères doit être effectué, notamment depuis :

  • les belvédères
  • la trame viaire et les espaces publics.
    Ces réflexions doivent être menées de manière globale, aux différentes échelles (avec un allé/retour entre le lointain et le proche) et aux différentes étapes du projet, du diagnostic à la conception.
    Dans l’optique de diagnostic, la carte mentale ou le parcours peuvent constituer des méthodes intéressantes d’identification des repères.

Le repère s’interroge différemment en situation de ville nouvelle et en situation de renouvellement urbain, comme dans les Hauts-de-Seine. Les effets induits sont différents. L’important est d’être conscient des impacts paysagers.

La création de nouveaux repères n’apparait pas nécessairement souhaitable. Avec l’idée sous-jacente que les repères peuvent se « créer tout seuls » et qu’ils ne se contrôlent pas toujours.

Cependant dans une recherche de « contrôle » ou d’anticipation de l’impact paysager différents outils ont été cités :

Le cahier des charges constitue un outil à mobiliser. Il peut permettre :

  • d’identifier les repères à préserver,
  • d’anticiper le travail d’insertion paysagère en donnant des éléments aux concepteurs. Ainsi le cahier des charges peut choisir d’imposer la préservation de vues ou bien uniquement identifier les potentialités en laissant libre cours aux propositions des concepteurs,
  • imposer dans le rendu des projets des projections de loin comme de près des nouvelles constructions.
    Aujourd’hui dans les projets, les impacts sont aisément anticipés dans un périmètre proche, contrairement aux échelles plus lointaines.

La modélisation 3D constitue un outil à mobiliser dans ce cadre. Si des repères, à conserver ou à créer, sont identifiés, le projet doit permettre de les voir (par des dégagements, des ouvertures, la forme des tissus, etc.).

La protection réglementaire de cônes de vue dans les documents d’urbanisme constitue un autre moyen de protéger les repères.
Cela existe notamment dans les PLU de Paris ou de Saint-Cloud. Cela peut cependant conduire à l’effet pervers de figer le paysage. Il peut parfois être plus intéressant d’imposer dans le règlement de « prendre en compte » la vue plutôt que d’en imposer systématiquement la protection intégrale.

Le tramway, bien qu’il ne soit conçu par les services voiries du CG 92 que comme un transport, constitue un élément pouvant permettre de se repérer et/ou de rendre visibles des repères par le déplacement qu’il occasionne et l’aménagement de l’espace public. Il bouleverse le paysage. Il transforme des grands boulevards d’apparence minérale et peut projeter une image mentale d’espace vert en raison de son aménagement du sol en herbe.

Des interventions ponctuelles peuvent également participer à la création de repères : exemple de la colorisation de façades (à Montrouge où la règlementation privilégie le choix de couleurs vives qui différencie la commune), de choix de mobiliers urbains.

La conservation des bâtis anciens est également vue comme une occasion de donner des repères temporels afin de se situer dans le temps.
A ce titre, le parcellaire peut également constituer des traces temporelles dans le paysage.

Le Grand Paris pourrait s’emparer de la question du repérage dans le territoire métropolitain. Ses réflexions peuvent amener à imposer les manières dont on doit se repérer au sein de la métropole. Le repère peut constituer un levier pour faire émerger une identité métropolitaine.
Cependant c’est chaque projet qui participe à la création ou non de repère par la construction. Actuellement, étant donné le pouvoir des maires sur l’aménagement et la construction, le travail de repérage s’effectue à l’échelle de la commune

Le compte rendu du porte parole – Catherine Brunet

Différentes familles de repères ont été identifiées :
  • les repères naturels (reliefs, boisements, grands parcs…)
  • les repères artificiels (tours, la Défense, formes urbaines, centralités)
  • les repères symboliques
  • les repères historiques

Se repérer est fortement lié à l’expérience personnelle des lieux.

Le repère se crée également par un aller-retour entre les échelles (dans le grand territoire, dans les Hauts-de-Seine, à des échelles plus locales…) ainsi que par le contraste (versus banalisation).
Les repères constituent une sorte de balisage du grand espace comme de l’espace de proximité. Ils permettent de se situer mais également de s’approprier les lieux.

Il existe un risque de surenchère / de « sur-repérage » auquel il faut être attentif et qui sous-entend un désir de sélectionner les repères, à partir d’un état des lieux de l’existant et de réflexions sur l’insertion paysagère à l’occasion des projets.

Différents moyens peuvent être utilisés pour identifier/créer/préserver les repères :

  • les outils de modélisation, qui permettent de visualiser l’impact des projets dans les perceptions,
  • la carte mentale, le parcours,
  • le rôle des centres villes et des lieux de centralité,
  • l’importance de la signalisation,
  • l’identification des cônes de vue, mais en portant attention au risque induit d’une trop grande protection et in fine de figer les paysages,
  • faire de la question des repères un élément des cahiers des charges avec la possibilité d’imposer ou non la préservation/création de repères

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